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Du sang froid en cet été chahuté

Le coude-à-coude entre le camps du Leave et du Remain aura duré des semaines. Le Royaume-Uni sortira de l’UE. Le mariage aura duré moins de 45 ans. Le divorce sera prononcé dans deux ans, sauf prolongation, selon des modalités qui restent à définir. Entretemps, ce sera l’incertitude tant pour les Britanniques que pour la construction européenne. Mais aussi pour la Suisse.

 

Le séisme est à la mesure du poids de la Grande-Bretagne: 2e puissance économique européenne après l’Allemagne, 5e puissance au plan mondial, membre du G7 et du Conseil de sécurité de l’ONU. En 1940, Churchill avait promis à son peuple du sang, de la peine, des larmes et de la sueur. Heureusement, du sang, il n’y en aura pas mais pour le reste… Sans attendre le dépôt formel de la demande de sortie de l’UE, on s’affaire des deux côtés de la Manche pour envisager l’après Brexit.

Certes, les Britanniques n’ont jamais été séduits par l’intégration politique. Et les plus anciens se souviennent peut-être encore que la première tentative d’adhésion à l’alors CEE s’était heurtée, en 1961, au refus de la France. Mais le verdict populaire tient bien davantage au fait que l’Europe d’aujourd’hui fait beaucoup rêver. Perçue comme technocratique et peu démocratique – aussi sur le Continent – elle n’a pour l’heure pas su empoigner la très délicate problématique de l’immigration qui a pesé de tout son poids dans les urnes.

Une Europe stable est dans l’intérêt de la Suisse, vu notre forte interdépendance économique et les enjeux géostratégiques.

La Suisse n’est pas épargnée, aussi bien sur le plan économique que politique. Dans l’immédiat, et sans surprise, le franc suisse s’est renchéri, mettant par là-même encore davantage nos exportateurs et les investisseurs sous pression. La Banque nationale suisse intervient pour limiter les dégâts. A moyen terme, dans l’éventualité d’une crise structurelle au Royaume-Uni – voire d’une récession – notre économie serait directement affectée. Il s’agit en effet de notre cinquième marché d’exportation, devant la Chine ou l’Autriche et l’Espagne réunies. Si à cela devait s’ajouter un ralentissement conjoncturel au sein des autres Etats membres de l’UE, l’impact serait d’autant plus marqué.

Sur le plan politique helvétique, le Brexit rend sensiblement plus ardues les tant espérées négociations avec l’UE en vue de la mise en œuvre de l’initiative «contre l’immigration de masse». L’UE et ses 27 Etats membres dégageront-ils du temps alors qu’ils ont deux ans seulement pour préparer la sortie de la Grande-Bretagne et convenir d’un nouveau modus vivendi ?  L’UE fera-t-elle davantage de concessions à la Suisse en matière de libre circulation qu’elle n’a voulu en faire à la Grande-Bretagne ? Les semaines et mois à venir le diront. Côté suisse, l’heure tourne. Nous devons plus que jamais faire preuve de sang-froid et de pragmatisme. Concrètement, il s’agit à la fois de continuer de chercher une solution avec l’UE mais aussi d’aboutir rapidement à un large consensus politique autour d’une clause de sauvegarde. Une mise en oeuvre unilatérale doit rester l’ultime recours, compte tenu de tous les risques que cela comporte pour les Bilatérales. Sans compter que nous devrons nous aussi prévoir des accords pour régler nos relations avec la Grande-Bretagne.


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